L'intérêt de la Cour de cassation pour la médiation ne faiblit pas


Deux arrêts rendus par la Cour de cassation dès la rentrée judiciaire de ce mois de septembre 2022 illustrent l’intérêt de la juridiction pour les MARD.

La première de ces affaires (Com. 14 septembre 2022, pourvoi n° 21-17.222) opposait une société exerçant une activité de biologie médicale à l’un de ses associés, en raison de son exclusion de la société.

Le 24 janvier 2022, le président de la chambre commerciale avait ordonné une médiation en cours d’examen du pourvoi. Le médiateur désigné ayant informé la Cour de l’échec de la médiation trois mois après sa désignation, le pourvoi a finalement été examiné et donné lieu à un rejet non spécialement motivé.

Ce qui est remarquable dans cette affaire est que la médiation a été ordonnée le 24 janvier 2022, avant même l’entrée en vigueur de l’article 1012 al. 3 du CPC tel qu’issu du décret n° 2022-245 du 25 février 2022 donnant expressément ce pouvoir au président de la chambre désignée de la Cour de cassation.

La seconde affaire (Civ. 1ère 7 septembre 2022, pourvoi n° 21-12.602) portait sur un litige de contrefaçon, concurrence déloyale et parasitisme. Elle opposait des parties se disputant l’usage à titre commercial d’un signe distinctif qui constituait le nom patronymique de l’une d’entre elles et avait été déposé à titre de marque par son adversaire depuis plusieurs décennies.

La Cour de cassation a partiellement accueilli le pourvoi de la société titulaire de la marque, faisant une application de l’article L. 713-6 du CPI qui intéressera les spécialistes du droit des marques en ce que l’arrêt distingue la contrefaçon de la marque par reproduction (pour l’usage du seul nom patronymique) et par imitation (quand le nom patronymique est associé à un prénom). La Cour de cassation rappelle par ailleurs que la concurrence déloyale ne suppose pas de démonstration d’une faute intentionnelle.

C’est le dispositif de l’arrêt qui intéresse spécialement le domaine des modes alternatifs de règlement des litiges.

Comme dans un arrêt rendu quelques semaines auparavant (Com. 22 juin 2022, pourvoi n° 20-11.846), la Cour de cassation casse partiellement l’arrêt et, sursoyant à statuer sur le renvoi devant une cour d’appel, elle ordonne une médiation. De la même manière que le ferait un juge saisi au fond en cours de procédure, elle précise les modalités de cette médiation conformément aux dispositions des articles 131-1 du CPC et désigne pour y procéder la chambre arbitrale internationale de Paris.

Ces deux affaires démontrent la volonté de la Cour de cassation de s’approprier les modes alternatifs de règlement des litiges et l’ouverture des parties à s’engager dans une telle voie, même à hauteur de cassation, puisque les médiations ordonnées n’ont pu avoir lieu qu’avec leur accord en application de l’article 131-1 du CPC.

Elles démontrent également que, si le code de procédure civile ne prévoit expressément la possibilité pour la Cour de cassation d’ordonner une médiation qu’en cours d’examen du pourvoi et après dépôt des mémoires des parties, rien n’interdit une médiation judiciaire en dehors du cadre strict défini par l’article 1012 du CPC, par application des dispositions énoncées en termes généraux des articles 131-1 et suivants du CPC.

Tout spécialement, l’arrêt du 7 septembre 2022 devrait enfin inciter les juges du fond à s’emparer eux aussi de l’outil de la médiation post-sentencielle lorsque, notamment en matière commerciale, le litige ne peut pas prendre fin par la seule décision juridictionnelle puisque les parties n’ont d’autre choix que de continuer à cohabiter.


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